Paradox Hotel

« Paradox Hotel » (The Paradox Hotel), publié aux éditions Belfond en 2023 dans sa version française, a été écrit par Rob Hart, un écrivain américain contemporain qui, ici, mêle habilement roman noir et thriller temporel…

Un trépidant polar temporel

Paradox Hotel - Rob Hart - éditions Belfond
"Paradox Hotel" de Rob Hart © éditions Belfond - Illustration couverture © DEEPOL by plainpicture/Spectral. Graphisme : Marion Tigreat

Promenez-vous dans le Temps

A la fin du XXIème siècle, les plus riches des humains de la planète peuvent désormais se permettre d’aller explorer le passé, visiter l’Égypte antique au temps de sa splendeur ou rencontrer les dinosaures du Crétacé supérieur (entre autres), grâce à la découverte du voyage dans le temps et le développement d’une nouvelle forme de tourisme : le tourisme spatio-temporel. Et bien sûr, les chrononautes ne peuvent pas modifier la trame du temps surveillée constamment par l’ART (l’Agence de régulation du Temps).

Ces néo-touristes sont hébergés au Paradox Hotel (construit à proximité du chronoport Einstein), qui s’apparente à une gigantesque gare où se rencontrent tous les voyageurs en arrivée ou en partance pour les destinations extraordinaires du Passé.

Catastrophes en séries

En cette année 2072, l’hôtel est mis en vente et un important Sommet doit avoir lieu pour décider qui, parmi quatre des plus puissants milliardaires, pourra l’acquérir.

Mais bientôt, tout part en vrille : une tempête de neige à l’extérieur, des anomalies et incidents à l’intérieur… Tous les voyages temporels sont suspendus.

Nous sommes ainsi transportés dans un lieu où les personnages évoluent en vase clos au sein de sombres intrigues.

Chargée de la sécurité de l’hôtel, l’impétueuse et « mal embouchée » January Cole (qui, entre parenthèses, m’a rappelée Andrea Cort, une autre détective au caractère bien trempé…), mène l’enquête pour déterminer qui sont les responsables de ce désastre et comment les arrêter, alors qu’il semble également qu’un meurtre ait été commis dans une des chambres de l’hôtel.

Paradoxes et illusions

Vous découvrirez que cet hôtel porte bien son nom parce que tout n’y est que paradoxes.

Paradoxes des êtres qui se côtoient dans les flux du passé confrontés à ceux du présent et de l’avenir, paradoxes d’un monde où tout se délite et s’entrechoque, où les êtres se croisent sans se voir tels qu’ils sont vraiment, où ils vivent ensemble en croyant se connaitre mais s’égarent, un lieu où il ne faut faire confiance à personne.

Tout n’y est pas noir ou blanc mais des nuances de gris, de bleu et de rouge s’infiltrent dans les interstices des couloirs et des chambres de l’hôtel, alors que les apparences sont trompeuses et les fantômes, fugaces…

Et pour arranger le tout, il semblerait que le Temps se casse…

January Cole elle-même doit affronter les ravages du « Décollement » qui semblerait être une maladie survenant lorsqu’on est soumis à une trop grande « irradiation temporelle ». A cause des conséquences de cette affection, l’enquêtrice perçoit inopinément des bribes d’événements passés ou futurs qui la projettent à intervalles irréguliers dans des scènes décalées dans le temps. Un inconvénient qui pourrait pourtant bien lui être un avantage non négligeable dans son enquête…

Lire entre les lignes

Pouvoir et richesse

Vous pourrez découvrir aussi qu’entre les lignes de ce polar trépidant, l’écrivain porte également un regard acéré sur une société où les luttes pour le pouvoir et l’appât du gain sont toujours prédominants, en soulignant les tensions existantes entre classes sociales différentes, dans un lieu où se croisent d’odieux milliardaires qui ne rêvent qu’à acquérir plus de puissance et des employés malmenés qui, pour la plupart, ne pensent qu’à faire leur job le mieux possible quelles que soient les circonstances…

Au-delà de l’enquête

Mais « Paradox Hotel »,  c’est aussi :

  • L’amour perdu qui hante une jeune femme accablée par la mort de son amante, une enquêtrice qui doit affronter ses démons avant de comprendre les démons des autres,
  • Un questionnement sur le sens et le poids de la famille en tant qu’élément fondateur de sa personnalité (la famille dont on hérite à la naissance versus celle qu’on adopte dans un monde où le choix est toujours possible),
  • Une réflexion sur la souffrance qu’on impose aux autres, substitut de la souffrance qu’on s’inflige à soi-même lorsqu’on refuse de s’y confronter,
  • De l’humour (j’ai bien aimé l’épisode des petits vélociraptors en vadrouille et le drone intelligent de January), de la mélancolie, de la tragédie et beaucoup d’action !

Le thème du voyage dans le temps a certes déjà été utilisé dans beaucoup d’œuvres de science-fiction mais l’écrivain réussit à renouveler le genre en basculant dans le roman noir et en apportant quelques idées novatrices.

Bref, « Paradox Hotel » est un roman surprenant et addictif, où l’auteur ose même insérer quelques références à Lewis Caroll et à son fameux poème « Jabberwocky »  ( Dans « De l’autre côté du miroir »).

C’est un polar trépidant qui nous arrache de la réalité presque malgré nous pour nous propulser dans les soubresauts d’un lieu énigmatique et d’un temps perturbé, un voyage fantastique et perfide qui nous emporte à 100 à l’heure vers un lieu inconnu et une destination inattendue…

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